« Aux Moulins, il n’y a pas de problème. C’est un exemple formidable. » déclarait Christian Estrosi le 24 juin 2020, à quelques jours du second tour des élections municipales. Un mois plus tard, c’est entouré de CRS et avec un hélicoptère au-dessus du quartier, que le fraîchement réélu maire de Nice se rendait dans ce « quartier prioritaire », après une fusillade en plein jour ! Accompagné du préfet, il était alors pris à partie, encerclé… Ce qui se voulait une démonstration de force tournait à l’humiliation.

Cette fusillade n’était alors pas un fait isolé. L’été 2020 fut ainsi marqué par une explosion des règlements de compte par armes à feu, mais aussi des coups de couteau. Quelques mois auparavant, le candidat Estrosi faisait tout pour éviter le sujet de l’insécurité lors des élections municipales, préférant se concentrer sur le développement des pistes cyclables. Pourtant, sondage après sondage, les Niçois continuent d’affirmer que la sécurité est bien leur première préoccupation !

Et Christian Estrosi, dont la municipalité commande ces sondages réguliers pour évaluer l’humeur des Niçois, l’impact de sa politique ou encore la popularité de ses opposants, le sait bien. Faute de résultats probants – les coups et blessures volontaires ont augmenté de 10,5% entre 2017 et 2021, le soutien d’Emmanuel Macron fait donc ce qu’il fait encore de mieux : de la communication !

En février 2021, une pleine page de publicité achetée (avec l’argent des contribuables niçois) dans l’influent quotidien local Nice Matin affichait « Nice ville la plus sûre de France ». L’ennui est que la revendication audacieuse s’appuyait sur un site internet inconnu où avaient été recueillis 60 avis… Vergougna, aurait dit mon arrière-grand mère en niçois.

Christian Estrosi était tout fier aussi de relayer en décembre 2021 que Nice était la commune déployant le plus de moyens pour la sécurité. Las, au même moment des policiers étaient violemment attaqués dans le quartier de l’Ariane à l’occasion du tournage d’un clip de rap. C’était oublier un peu vite qu’une politique ne s’évalue pas qu’en vertu des moyens qu’on lui octroie, mais surtout au regard des résultats qu’on obtient.

« Nous faisons face à une augmentation des incivilités, des comportements agressifs et des trafics dans le parc HLM » déplorait le 14 mars, dans les colonnes de Nice Matin, un important élu estrosiste. Qu’en aurait donc pensé le Christian Estrosi qui déclarait lors de sa première candidature à la mairie : « Quand je vois des immondices s’amonceler au bas des fenêtres de certaines tours, quand je vois des carcasses de voitures joncher les parkings, quand je vois des boîtes aux lettres défoncées, des halls d’immeubles dévastés, quand plusieurs jours voire plusieurs semaines des ascenseurs demeurent hors service, contraignant les personnes âgées à monter quelquefois dix à quinze étages à pied, j’ai honte. »

C’était en 2007, 15 ans plus tard ces mots pourraient être les miens.

Philippe Vardon

Tribune parue le 24 mars 2022 dans Valeurs Actuelles